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QUI S'EN INQUIETE ? (William BOOTH) Fondateur de L'Armée Du Salut

William Booth
                            QUI S'EN INQUIETE ? (William BOOTH)
                      Fondateur de L'Armée Du Salut
                           (1829-1912)

 

Mon âme s’emplit d’une vision qui m’apparut alors que je méditais sur la multitude qui périt, et je ne puis me défendre de vous la décrire. Je croyais voir un océan sombre et agité. Le tonnerre grondait dans l’amoncellement des nuages noirs suspendus très bas sur les eaux. Des éclairs fulgurants déchiraient les ténèbres. Le vent déchaîné avait des rugissements de fauve. Les vagues, enflées et menaçantes, s’écroulaient en écume pour reformer sans cesse leurs escadrons hurlants.

Tout à coup, je distinguai, dans les remous des ondes, des milliers de pauvres humains qui, tantôt submergés, tantôt flottants, poussaient des cris et des lamentations, se débattant pour échapper à la mort. Leurs efforts les ramenaient un instant à la surface, mais après un dernier appel désespéré, ils étaient pour toujours engloutis.

Et de ces sombres flots en furie, je vis surgir un immense rocher qui s’élevait plus haut que les noirs nuages. Tout autour de la base de ce rocher s’étendait comme un vaste quai sur lequel j’eus la joie de voir plusieurs des malheureux naufragés se hisser hors de l’eau ténébreuse après leur lutte contre la mort. Il en arrivait continuellement et plusieurs des réfugiés aidaient les nouveaux arrivants à y prendre pied.

En regardant plus attentivement, je vis que certains des rescapés s’ingéniaient au moyen d’échelles, de cordes, de barques, à repêcher ceux qui étaient restés la proie des éléments. Ça et là, quelques sauveteurs se jetaient même à l’eau sans calculer les conséquences de leurs ardeurs à secourir. Et je ne saurais dire ce qui me donna le plus de joie, de voir les malheureux échapper au danger en escaladant le rocher, ou les sauveteurs qui, pleins d’amour et d’abnégation, semblaient n’exister que pour arracher aux flots leurs victimes.

En examinant de près les réfugiés assemblés sur le rocher, je constatai qu’ils étaient très mélangés. Ils formaient plusieurs groupes qui s’occupaient à différentes activités, mais sur la quantité, un petit nombre seulement semblait se consacrer au sauvetage des naufragés.

Une chose cependant m’intriguait, car, bien que tous sans exception eussent été sauvés de la furie des vagues, à un moment ou à un autre, la plupart de ceux qui composaient les groupes semblaient l’avoir complètement oublié. En tout cas, l’impression du danger couru dans les ténèbres ne les affectait guère, et le plus étrange, c’est qu’ils paraissaient ne pas s’inquiéter, encore moins s’alarmer du sort des infortunés que roulait encore la mer démontée, parmi lesquels ils comptaient pourtant un mari, une épouse, une mère, une sœur, un enfant ! Cependant, leur indifférence n’avait pas d’excuse de l’ignorance, puisque la tragédie se déroulait sous leurs yeux, qu’ils en parlaient parfois et assistaient régulièrement è des conférences où il était question de ce drame épouvantable.

J’ai déjà dit que ceux qui occupaient le quai de salut s’absorbaient dans divers travaux : les uns passaient les jours et les nuits à faire du commerce et accumulaient leurs gains dans des coffres ou autres cachettes. Beaucoup s’amusaient à cultiver des fleurs sur le bord de la grève ; d’autres à barbouiller des morceaux de toile avec de la peinture, ou à faire de la musique ou à s’attifer de plusieurs manières et à parader comme mannequins pour se faire admirer.

D’autres encore passaient beaucoup de temps à table, ou s’aventuraient dans d’interminables discussions touchant les pauvres créatures que la mer ne lâchait pas, et se perdaient en conjectures sur leur fin probable. Un petit groupe accomplissait d’étranges cérémonies religieuses.

Certains réfugiés passaient le temps en pensées agréables, se félicitant d’avoir été sauvés de l’abîme et chantaient des hymnes pleins de bonheur qui les attendait sur la terre qu’ils croyaient apercevoir au loin.

Pendant tout ce temps, la foule des naufragés criait au secours en se débattant, si près qu’on aurait pu les sauver rien qu’en étendant la main. Mais faute de ce secours, ils périssaient sous les yeux des spectateurs, non pas isolément et de temps à autre, mais pas bandes, et à chaque instant.

Les sauveteurs ne s’accordaient aucun répit au point que beaucoup de gens bienveillants et des mieux disposés, très religieux même, étaient unanimes à les qualifier de pestes. Mais cela n’arrêtait pas leur zèle : ils mettaient tout leur argent, et tout ce qu’ils pouvaient trouver pour construire barques, radeaux, remorques, cordages, et tous autres engins que leur imagination fertile pouvait inventer, pour secourir les naufragés en péril. Certains les traitaient de fous.

Puis je vis quelque chose de plus merveilleux encore. Il me sembla que la misère, l’agonie, le danger, les blasphèmes de ces pauvres gens en proie aux menaces de l’eau excitaient la pitié du puissant Dieu du ciel, au point qu’il envoyait un grand personnage pour les délivrer ; et cet Envoyé de Dieu quittait son palais de lumière, traversait l’épaisse couche de nuages et se jetait dans la mer furieuse parmi les malheureux qui, d’épuisement, étaient sur le point de se laisser couler. Je le vis s’évertuer à les sauver au prix d’efforts surhumains, d’appels et de larmes, jusqu’à ce que la sueur de son front tombât en gouttes sanglantes; et tandis qu’il saisissait dans ses bras, l’un après l’autre, tous les misérables naufragés, et cherchait à les hisser sur le roc, Il ne cessait d’appeler ceux qui y étaient déjà en sûreté, ceux que lui-même avait aidés à y monter, de ses propres mains ensanglantés, pour qu’ils vinssent l’aider dans son immense tâche.

Ce qui m’intriguait le plus c’était l’attitude de ces réfugiés que le grand Envoyé appelait à la rescousse. Ils l’entendaient bien et sentaient qu’ils devaient lui obéir, du moins le disaient-ils. Ils l’aimaient de tout leur cœur, étaient remplis de sympathie pour sa personne et pour l’œuvre qu’il avait entreprise. Ils l’honoraient ou prétendaient l’honorer ; et néanmoins leur métier, leur profession, leurs économies, leurs plaisirs, leurs familles, leurs cercles, leur religion et les discussions qu’elle provoquait, leurs préparatifs pour passer sur la terre ferme, tout cela les absorbait si totalement qu’ils restaient sourds aux pressants appels que le Sauveur leur adressait su sein de la mer démontée.

Mais je n’étais pas au bout de mes étonnements dans cet étrange rêve, car un certain nombre de ceux qui avaient été recueillis sur le quai du salut et que le grand Envoyé appelait à ses cotés, non seulement restaient sourds à ses cris, mais encore le suppliaient avec larmes de venir à eux ! Ils insistaient pour qu’il restât auprès d’eux et dépensât son temps et ses forces à les rendre plus heureux ! D’autres voulaient qu’Il vînt dissiper certains doutes, certaines appréhensions qu’ils avaient concernant le vrai sens de quelques écrits qu’Il leur avait fait parvenir ! D’autres enfin demandaient qu’Il vînt les affermir sur le roc et leur donnât l’assurance de ne plus retomber dans l’eau perfide. Quantité d’autres voulaient être certains d’atteindre un jour la terre ferme, que plus d’un avait manquée. Ils suppliaient : « Viens à nous ! Viens à notre aide ! » …

Alors je compris tout ! Plus de doute : cette mer était l’océan de la vie, l’océan de l’existence humaine telle qu’elle se déroule. La multitude qui se débat dans ces houles d’orages, en criant dans l’agonie de la mort, ce sont les millions de pauvres prostituées et leurs exploiteurs, les millions d’ivrognes, de voleurs, de menteurs, de blasphémateurs, d’impies de tous les rangs de la société, de toutes nationalités et de toutes langues. Oh ! Cette mer, comme elle est noire ! Quelles multitudes de riches, de pauvres, de gens instruits ou ignorants, tous différents et pourtant tous semblables sur un point : leur culpabilité devant Dieu, l’esclavage qui les enchaîne à quelque iniquité, à quelque luxure diabolique, l’idole ou le démon dont ils subissent la fascination !

Et le grand rocher de salut c’est le Calvaire, où se tiennent tous ceux qui ont été sauvés. La façon dont ils emploient leur temps et leurs forces représente les occupations auxquelles se consacrent ceux qui, après avoir été arrachés au péché et à la mort, font profession de servir Dieu.

Le grand Sauveteur est le Fils de Dieu toujours à l’œuvre pour sauver les multitudes autour de nous, que menace le salaire du péché, la seconde mort. Ses appels angoissés dominent sur tout. Il crie à ceux qu’Il a déjà tirés du danger de venir l’aider à sauver le reste du monde.

Regardez ! Ne vous bercez pas d’illusions ! La réalité est bien plus épouvantable qu’on ne peut l’imaginer ! …

Jésus-Christ vous appelle, vous, pour que vous vous jetiez à l’eau et que, bravant la tempête, vous alliez auprès de Lui pour Lui prêter main-forte !

Ferez-vous le saut ? Viendrez-vous à ses pieds, Lui permettant de disposer de vous entièrement ? ….

( Lire Épître de Paul aux Romains, chapitre 10.9-21 )



13/06/2012
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